»  JE RETOURNERAI VERS MON PREMIER MARI   » par DOMINIQUE

MAV: j’ose dire à  la lecture de ce témoignage que Dominique a connu une forme légèrement édulcorée du pervers narcissique, même si elle a été détruite et jusqu’au bord du suicide. Chaque cas est unique  !  Mais je ne retrouve pas ce que j’entends trop souvent chez les victimes de PN dont les témoignages à  présent affluent: la volonté consciente de réduire sa proie à  l’état de loque, jusqu’à  la mort souvent, en la faisant passer pour la coupable, en l’isolant, et en exerçant une séduction ravageuse envers  l’environnement. Pourtant ce témoignage est très intéressant, car le Seigneur montre aussi les conséquences d’un remariage qu’il désapprouve, et Dominique, tout comme son mari, et de manière miraculeuse, a permis de réunir à  nouveau  ce qui était cassé…C’est très édifiant !

Dominique : Michelle, voici ce que je pourrais raconter, et raccourcir si besoin :

62 ans cette année, mariée trop jeune à  19 ans et mère à  20 ans, je n’avais qu’un désir, quitter le domicile de mes grands parents dont la seule évocation me rappelle une enfance marquée d’abandon, de coups et de punitions.

La seule lumière de réconfort c’était dans l’église catholique de mon village à  prier Jésus et sa maman de m’aider à  supporter et survivre. Donc je me suis jetée dans le mariage avec le premier venu, catholique, soixante huitard attardé, de trois ans plus âgé, brillant mais éternel étudiant. Très vite je me suis rendue compte de mon erreur mais dans mon église on ne divorçait pas… Même si les adultères de monsieur n’étaient pas une raison, et même si nous ne nous entendions sur rien et n’étions jamais d’accord sur rien.

A la naissance de notre second enfant, six ans plus tard, rencontre avec des frères et soeurs d’un groupe de prière du renouveau charismatique catholique et conversion profonde avec Jésus qui m’a dit « ce que j’ai contre toi, c’est que tu as abandonné ton premier amour »… Lui Jésus était oui mon premier amour depuis mes 5 ans dans une magnifique abbaye (Hautecombe du temps des moines et des chants grégoriens). Pendant 4 ans j’ai pleuré après cette effusion de l’Esprit dont tout le monde chrétien parlait mais rien ne venait et c’est au moment où je m’y attendais le moins, qu’Il m’est tombé dessus, au cimetière, sur la tombe de mon bébé de 4 mois qui venait d’être repris après avoir été donné. J’ai cherché la face de Dieu, me suis lancée dans une formation dans un institut biblique, sans que rien ne réussisse à  me rapprocher de mon mari, emmurés chacun dans nos solitudes et nos désillusions. Deux ans plus tard une nouvelle petite fille arrivait à  notre foyer me redonnant une dernière joie immense d’être à  nouveau maman. Notre vie conjugale était chaotique, mon mari refusait de se fixer dans un travail, d’assumer une quelconque responsabilité de père et d’époux. Et ce qui aurait pu être évité arriva: je demandais le divorce après 17 ans de mariage.

Parce qu’aucun Frère ou Soeur dans l’église évangélique n’avait pu ou su nous conseiller et ou nous aider, autrement qu’en me jugeant et me condamnant, je ne remettais plus jamais les pieds dans ce milieu. Je divorçais pour forcer mon mari à   changer tout en continuant à  l’aimer au plus profond de moi, mais la vie conjugale s’avérait insupportable.

Un divorce bagarre, surtout au sujet des enfants, des différends continuels sur le mode de garde, les modalités définies par le juge jamais respectées pas plus que le versement des pensions alimentaires, je m’en sortais toutefois bien avec un salaire convenable et élevais dorénavant seule mes 3 enfants. Six ans ainsi, accompagnée par des frères et soeurs catholiques charismatiques et tolérants.

Pendant ce temps mon ex-mari, après s’être montré harcelant, du jour au lendemain, silence radio total.

Six ans plus tard j’apprenais son remariage avec une femme étrangère mère de 4 enfants. J’étais furieuse, mes enfants encore plus, mais je décidais de tourner définitivement la page et… par revanche, acceptait les propositions insistantes d’un ancien ami de notre famille, voisin. Veuf.

J’aurais dû me méfier, j’avais connu son épouse qui s’était laissée mourir d’un cancer du sein, éternellement dépressive et visiblement malheureuse en ménage. Il a su me convaincre, nous étions libres tout deux, nous nous connaissions depuis 20 ans. Charmant, charmeur, situation stable, une maison, de grands enfants, pourquoi pas ? Le fait qu’il n’accepte pas mes enfants aurait dû me mettre la puce à  l’oreille. Mais le chant des sirènes, l’idée d’une vie stable, finies les galères de fin de mois, la tendresse partagée, je me laissais convaincre et 6 mois après une cour assidue nous étions remariés. Je venais habiter chez lui, dans la maison construite avec sa première femme, sans que bien vite je réalise que je n’avais pas le droit d’y changer le papier peint, les rideaux ou d’accrocher photo ou tableau.

Du jour au lendemain, de la bénédiction de mariage accordée par un prêtre compréhensif, il ne voulait plus mettre les pieds à  l’église, « toutes les religions se valent » et il enfourchait son vélo avec les copains des journées entières. Finies les randonnées ensemble et les invitations des amis. Les années ont commencé à  s’empiler, monotones et tristes. Ma fille adolescente devenait de plus en plus insolente. Elle se rebellait « tu n’as rien à  me dire, tu n’es pas mon père »…

Ce que je ne savais pas, c’est qu’en mon absence, il la frappait et l’insultait.  Puis nous avons perdu nos emplois, lui mis à  la retraite anticipée, et moi au chômage je ne gagnais plus ma vie correctement, je devenais une charge, j’étais bonne a rien, insultes continuelles, mépris, critiques, pas de coups physiques mais pressions psychologiques. Il passait sa vie à  éplucher mes comptes, à  me reprocher l’aide financière que je parvenais péniblement à  donner à  ma fille étudiante, à  me reprocher toute dépense ou sortie hors du domicile, même pour rendre visite à  mes enfants mariés. Et lui, n’achetait que le strict minimum pour la maison, quitte à  manger le pâté dans le papier d’emballage et dans des assiettes en carton pour éviter de faire tourner le lave vaisselle, dépenser de l’eau et de l’électricité. Volets fermés  à  19h  été comme hiver,    aucune salutation aux voisins, coupés du monde. Pour avoir repris un travail dans l’aide à  la personne, à  mi-temps, je ne subissais que reproches du style : « tu as un salaire de minable, tu ne vaux rien, tu travailles pour rien ».

On ne sortait pas, n’avions plus d’amis, découragés des repas où monsieur ne mangeait pas ce que j’avais préparé mais allait chercher dans le frigo les restes de la veille, s’installait devant son ordi à  jouer au sudoku ou à  faire des mots croisés, nous tournant ostensiblement le dos. A force de m’épuiser , physiquement et moralement, je suis tombée gravement malade, diabétique. Le choc d’avoir à  me piquer et le manque de sommeil m’ont conduit à  la dépression. Plus de goût de vivre, je ne pensais qu’à  me suicider, en finir avec cette vie gâchée. J’avais tout raté, sauf mes enfants, je vivais avec un homme que je n’aimais pas et que je n’avais jamais aimé, je voulais le quitter depuis le début sans trouver en moi le ressort ni le courage de réagir.

C’est à  ce moment là  qu’un psychologue choisi par mon diabétologue m’a aidée et éclairée en me disant que je n’étais pas la malade mais que mon mari lui devait se faire soigner… Je pouvais rester couchée des journées entières, incapable de faire quoi que ce soit, moi qui avait toujours été une femme dynamique, entreprenante, attentive aux autres et généreuse.

C’est alors que dans ma détresse, j’ai crié au Seigneur et je ressentais du plus profond de ma misère le Saint Esprit qui était toujours en moi, même si je n’avais pas mis les pieds dans une église depuis 15 ans et qui gémissait en des soupirs inexprimables. Éclaire moi, pardonne moi, j’aurai du t’écouter et rechercher ta Face avant de plonger tête baissée dans ce remariage catastrophique. Tout est de ma faute.  

J’ai tenu encore 3 ans, incapable de me décider à  partir, pour aller où, avec quels moyens et enfin au bout de 17 ans, parce qu’il a osé me dire que je n’étais pas chez moi, dans la maison qu’il avait en indivision avec ses enfants, une rage froide m’a submergée, j’ai pris une valise, y est mis quelques habits (chiffons comme il disait) et suis partie pour ne jamais y revenir. Une amie m’a permis de dormir un mois dans son grenier puis je suis allée vivre chez ma fille dans sa chambre d’étudiante de 18 m2. On a eu faim, on a eu froid mais toujours Dieu a mis sur notre chemin des personnes pour nous donner à  manger (même mon employeur musulman !) et m’aider à  tenir ferme face à  un homme qui disait à  qui voulait l’entendre que j’étais une folle, partie sur un coup de tête, une sale gamine.

Durant un an il    n’a cessé son chantage : « tu auras tout ce que tu voudras si tu reviens ». De ces 17 années seule me reste l’image de l’insecte pris au piège dans une toile d’araignée !

On ne se remarie pas après cet échec ? Sauf quand Dieu fait des miracles dans nos vies. A un mois de différence de mon abandon du domicile conjugal,    mon premier mari quittait le sien, se séparait de son ex-épouse sans qu’aucune concertation ni échange n’ait eu lieu entre nous depuis 25 ans. La Parole de Dieu    lui fut adressée : « va retrouver la femme de ta jeunesse » et tout aussi radicalement à  moi : « ce que j’ai contre toi, c’est que tu as abandonné ton premier amour ». Ce jour là  le Saint Esprit criait littéralement en moi, à  sa demande de remariage, dis lui OUI.

Notre Dieu ne manque pas d’humour, nous avons fêté nos quarante ans de mariage (moins quelques années), je porte au doigt une petite bague émeraude en signe de notre amour et de notre nouvelle fidélité et surtout : nous servons ensemble notre Seigneur dans le ministère, Il est notre Sauveur, Il nous a sauvés, chacun de la mort (lui a été homme battu, moi suicidaire) et de notre péché pour lequel nous avions beaucoup de pardons à  demander et à  nous donner. Grâces soient rendues à  notre Seigneur Jésus Christ qui a fait miséricorde.

Je suis consciente que ce témoignage est un vrai miracle. Oui Dieu existe, Il agit dans nos vies et à  Lui tout est possible. Je prie que toutes les victimes de ces pervers narcissiques trouvent sur leur chemin de souffrance celui ou celle que le Seigneur utilisera pour l’aider à  tout laisser sans jamais regarder en arrière. Jérémie  29/11  et plus encore : « ceux qui sèment/s’aiment dans les larmes moissonnent en chantant ».

Dominique