Transmis par Jean Clément – Source Dreuz Information

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Dois-je l’écrire ? Je ne suis pas socialiste. J’ai eu l’occasion de critiquer de nombreuses fois ce gouvernement, et Manuel Valls. Mais quand Manuel Valls prend une position digne, je dis que Manuel Valls prend une position digne, je le dis. Et, en l’occurrence, je dis que Manuel Valls prend une position digne dans l’affaire Dieudonné.

J’ajoute que ceux qui invoquent la liberté de parole ou les principes inhérents au Premier amendement à  la Constitution des Etats-Unis se trompent : il ne s’agit plus, en l’occurrence, de liberté de parole, mais d’incitations à  la haine, et, sans doute, d’incitations au meurtre, voire d’incitation au génocide. C’est en tout cas dans cette catégorie que tombent les propos tenus par le principal intéressé concernant Patrick Cohen et les chambres à  gaz. La liberté de parole ne couvre pas les incitations au meurtre, voire les incitations au génocide, qui peuvent faire l’objet de procédures judiciaires aux Etats-Unis, à  juste titre à  mes yeux. Dire  » je suis raciste  » est une chose (qui rentre dans la même catégorie que dire : je suis un salaud) : dire  » ce serait bien de tuer les Noirs  » est tout à  fait une autre chose.

Je précise que ceux qui parlent de  » spectacle  » se trompent aussi : il ne s’agit plus de spectacle lorsque les propos qu’on tient sont emplis de connivences permettant aux racistes, aux antisémites, aux négationnistes, à  ceux qui souhaitent la destruction génocidaire d’Israël de s’exciter ensemble et d’entendre de surcroît les incitations susdites.

Je souligne que les propos des dirigeants du Front National sur le sujet suffisent à  montrer que décidément, le Front National continue à  entretenir un rapport aux Juifs, au judaïsme et à  Israël couvert de moisissures.

Je souligne aussi que les propos tenus de façon récurrente dur un site tel que Boulevard Voltaire montrent la dérive de ce site vers des positions qui sont celles d’une extrême droite qui ne me semble pas très fréquentable.

Publier des propos anti-israéliens comme il en traîne dans des publications déjà  nombreuses n’a rien d’original. Faire de la publicité pour des livres radicalement anti-israéliens (tels  » Le livre noir de l’occupation israélienne « ) dans un contexte où des textes excusent ou édulcorent l’antisémitisme n’a rien de courageux.

Dans une société comme la société américaine, Dieudonné serait considéré comme si abject qu’il aurait déjà  disparu de l’horizon, et se produirait devant des salles quasiment vides. Malgré Obama, les Etats-Unis restent un pays très imperméable à  l’antisémitisme, et c’est ce qui en fait un pays qui reste plus sain que la France. On trouve aux Etats-Unis de la propagande  » pro-palestinienne « , sur les campus universitaires surtout, mais ceux qui disséminent cette propagande veillent soigneusement à  éviter ce qui pourrait permettre de les accoler à  des propagateurs de haine antisémite.

En France, l’abjection qu’incarne désormais Dieudonné remplit les salles, crée des réseaux, use de signes de ralliement prolongeant les connivences inhérentes aux spectacles. Les commentaires publiés après divers articles de presse montrent que l’antisémitisme remonte des égouts et traine désormais dans de nombreux caniveaux.

Parce qu’il prend position, avec courage, Meyer Habib, qui mène remarquablement un travail de vigilance contre l’antisémitisme et l’  » antisionisme « , se voit incité à  aller vivre en Israël.

Cela ne concerne pas toute la France, sinon Jean-Jacques Goldman et Patrick Bruel y seraient des marginaux, tout comme Gad Elmaleh ou Patrick Timsit, mais cela concerne néanmoins une part inquiétante de la population française : il existe en ce pays une nébuleuse fétide où se mêle une extrême droite porteuse de relents pétainistes, catholiques intégristes, nationalistes myopes, anti-israéliens et anti-américains, une extrême-gauche qui ne se distingue de l’extrême droite que parce qu’elle est favorable à  l’islamisation du monde et à  l’immigration sans contrôles, et, précisément, des courants islamiques eux-mêmes anti-israéliens et anti-américains. L’extrême droite camoufle son antisémitisme sous le manteau de l’  » antisionisme « , qui est celui sous lequel s’abritent aussi extrême gauche et courants islamiques. Dieudonné trouve un public dans les divers composants de cette nébuleuse. Il suscite aussi chez des spectateurs de passage une accoutumance à  certains parfums. Ces parfums sont ceux de la décomposition.

On n’arrêtera pas la décomposition en interdisant des spectacles. Mais si des vagues de révolte contre ce que signifient ces spectacles se lèvent, ce seront des vagues salubres. Et elles ont mon soutien.

On n’arrêtera pas le recours à  certains gestes en interdisant ceux-ci. Mais faire un geste qui se trouve fait et photographié à  Auschwitz, devant des synagogues, devant l’école juive de Toulouse où Merah a assassiné des enfants juifs, devant des photos d’Anne Frank, et j’en passe, c’est faire un geste lourd de sens et lourd de son poids de cadavres, et se voir traité comme un être infâme pour avoir fait ce geste est pleinement légitime. C’est se faire complice, par l’esprit, d’un crime contre l’humanité passé et de crimes contre l’humanité présents : ceux qui frappent des Israéliens et peuvent les frapper. Et que face à  ce geste se lèvent aussi des vagues de révolte est sain et légitime.

Je crains, hélas, que Dieudonné soit l’un des signes annonciateurs de ce qui vient.

Je crains que des tendances plus denses et plus profondes soient à  l’oeuvre en France.

Je crains que les amis de Manuel Valls, qui oeuvrent au sein du parti socialiste ne servent ces tendances, sans toujours savoir ce qu’ils font.

Je crains que les amis de Patrick Cohen qui oeuvrent au sein de la nomenklatura médiatique ne servent eux aussi ces tendances, sans eux-mêmes toujours savoir ce qu’ils font.

Je crains que nous ne soyons dans une époque très malsaine, et que cela ne s’arrange pas.

Des Français quittent la France chaque année, comme on quitte un navire qui glisse vers le naufrage : c’est un fait.

Des Juifs quittent la France chaque année parce qu’ils sentent ce qui passe dans l’air du temps : c’est un fait encore.

Je comprends ces départs.

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