J’ai passé un après-midi inattendu mais … conduit.
Ayant fini plus tôt mon petit programme de révision journalière, j’ai pensé regarder dans mon stock de dvd pas encore ouverts.
J’ai visionné « Vienne avant la nuit », acheté il y a quelques années. Je croyais que ce serait une fiction. C’était en fait un documentaire d’un homme né à Vienne en 1931 qui revient sur les traces d’un arrière-grand-père mort en 1929. Parmi les éléments de la trame du film, une photographie de famille prise un peu avant le décès de l’aïeul. Vers la fin du film, on apprend que les deux tiers des personnes sur la photographie n’ont pas de tombe. Elles ont disparu dans des camps nazis.
Le documentaire est l’occasion d’évoquer des intellectuels juifs des années 30. Je savais que Stefan Zweig s’était suicidé de désespoir devant la déroute morale de l’Europe des années 30 et 40 mais d’autres le firent aussi, même plusieurs années après la guerre. Des synagogues qui brûlent … Des Autrichiens qui jubilent au moment de l’annexion de l’Autriche par le Reich nazi … Voilà ce qui est arrivé quand des hommes devinrent une masse guidée par les ténèbres.
Et voilà donc ce qui arrive de nouveau car les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Comme le documentaire ne durait qu’un peu plus d’une heure, je me suis souvenu d’un autre dvd que m’a donné il y a quelques semaines une des personnes qui participent aux manifestations contre la dictature sanitaire à Luxembourg.
« Töten auf tchechisch ». Une surprise de taille de voir que le documentaire avait été fait par des Tchèques. Pendant plusieurs décennies, il avait régné un silence de plomb sur les horreurs qui avaient eu lieu en Tchéquie en 1945, après la défaite du Reich nazi. Le documentaire commence par un film tourné à Prague en 1945. La fille du cinéaste explique que ceux qui parlaient allemand avaient été rassemblés. En fait, il s’agissait globalement de gens qui ne parlaient pas tchèque. Elle supposait qu’il y avait même une famille suédoise ainsi raflée. On les voit ensuite debout contre un mur, fusillés les uns après les autres. Puis on voit un camion militaire rouler délibérément sur les corps. Les autres parties du documentaire consistent surtout en témoignages recueillis dans des régions qui avaient été Sudètes. On apprend que l’un des « héros » de ces hauts-faits avait été un collaborateur des nazis qui avait rejoint la résistance tchèque vers la fin de 1944, quand le vent avait clairement tourné. En France aussi, ce genre de résistant de la onzième heure s’était ensuite distingué par son zèle … Il y a quelques images d’un groupe de jeunes soldats allemands qu’il a forcés à se molester les uns les autres, à ramper. Lui et ses hommes les ont dénudés, contraints à creuser une fosse et les ont assassinés les uns après les autres.
Il est ensuite question de Sudètes germanophones qui avaient été fusillés sur la grand place de telle ville, dans une caserne dans telle autre et enterrés à la va vite dans des charniers. Dans l’un de ces endroits, une rivière sortait de son lit chaque hiver si bien que, en 1947, des cadavres réapparurent. Ils furent incinérés dans un four voisin du terrain en question. Jamais personne ne parla de ces événements sinistres dans ces endroits jusqu’à ce que la caméra d’une nouvelle génération de Tchèques délie les langues …
L’identité des exactions est frappante. Des hommes sans défense battus, dépouillés, humiliés, sommairement tués et réduits en cendres.
Certains pensent que le nazisme retombait ainsi sur les Allemands et les germanophones eux-mêmes … Mais mon âme chrétienne sait bien que rien de cela n’est de la Justice. Non, bien au contraire. C’était exactement le même satan qui était à l’oeuvre, contre le juif d’abord, puis contre le non-juif ensuite. Dans l’ordre spirituel, cela ne fonctionne pas comme avec les mathématiques. Moins par moins, cela fait seulement plus de moins.
Alors, après avoir eu un aperçu de toutes ces horreurs qui sont autant de griffures du diable dans la chair des hommes, siècle après siècle, je me suis souvenu d’un jour de l’été 1984 où j’étais à Salzburg dans un Biergarten. Toutes les tables étaient prises mais deux vieilles dames, à l’une d’elles, acceptèrent que je me joigne à elles. C’est ainsi que je fis connaissance d’elles et de leur incroyable histoire, de leur belle amitié.
L’une d’elle était Sudète. Elle avait vécu l’expulsion de 1945, la marche à pied forcée jusqu’à la frontière autrichienne. Elle avait vu tomber des personnes âgées ou faibles, achevées sur place. Elle m’avait dit que les Russes avaient été moins haineux que les Tchèques avec eux.
L’autre était Tchèque, du même village. Elle avait continué à correspondre avec son amie d’enfance pendant quarante ans, à travers le rideau de fer. Désormais âgée, les communistes ne lui interdisaient plus de passer la frontière pour aller voir son amie en Autriche. J’ai correspondu avec elles quelques années. Steffi mourut la première. J’ai encore de la dame Tchèque un livre sur les châteaux de Tchéquie ainsi qu’une fleur qu’elle avait cousue et encadrée pour moi. Elles restent pour moi un inoubliable exemple que l’amour, l’amitié sont plus forts que les ténèbres de la haine, que c’est vraiment dans ces fidélités des coeurs que l’on vainc le sinistre ennemi de nos âmes.
Il est de retour. Il avance. L’air est de plus en plus empesté, enténébré. Les libertés s’évaporent. Le mensonge s’impose avec la même insolence qu’il y a 90 ans. « Rien de nouveau sous le soleil ».
Et la plupart ne voient rien venir.
Quand j’étais enfant, j’entendais les adultes passer leurs dimanches à se raconter les horreurs par lesquelles ils étaient passées. Je n’ai rien oublié. Par exemple que, à la fin des années 30, il y avait des Français qui écoutaient les discours de Hitler à la radio, discours auxquels ils ne comprenaient rien, mais ils trouvaient distrayant
d’entendre le possédé beugler. Ils riaient donc en coeur en imitant ses hurlements de bête satanique.
Qui sursautait en 2016 en entendant Klaus Schwab annoncer comme la chose la plus naturelle du monde que des sondes seraient implantées dans les cerveaux des gens d’ici à 2026 ? Qui s’offusque de ce qu’impliquent les propos de son conseiller Harari expliquant que la moitié de l’humanité va devenir inutile et qu’il conviendra de l’occuper avec un mélange de drogues et de jeux vidéo ?
« Une civilisation qui oublie son passé est condamnée à le revivre ».