(Cet article fait partie d’une série de cinq articles sur les trois offices de Christ, à savoir : prophète, sacrificateur et roi).
Christ s’acquitte de son rôle royal en « nous soumettant à lui, en nous gouvernant et nous défendant, et en réprimant et subjuguant tous ses ennemis et les nôtres (1) ». Puisque Jésus est Dieu, il possède une majesté et une gloire infinie. Il est le roi, tout simplement.
Néanmoins, comme c’est le cas dans ses offices prophétique et sacerdotal, il agit aussi en roi médiateur dont le royaume sera un jour remis à Dieu (1 Co 15.24). La royauté médiatrice est une fonction qu’il reçoit, et non pas une fonction qu’il usurpe. Il la reçoit du Père (Ph 2.5-11 ; Jn 5.22 ; Ac 2.36 ; 10.42 ; Hé 3.2-8). En tant que Fils, il était tout à fait approprié que Jésus soit le roi du monde.
La Bible parle souvent des rois. Adam a été le premier roi de la terre, et est donc appelé « fils de Dieu » (Lu 3.38). Adam a perdu son royaume en Éden. Après la chute, il était nécessaire qu’il y ait un nouvel Adam, et donc un nouveau roi avec un nouvel Éden. Christ allait être celui qui régnerait sur le nouvel Éden, son royaume (Ap 22.1-4).
Plus loin, l’Ancien Testament mentionne de nombreux rois. Ces derniers possèdent chacun un peuple sur lequel ils règnent, pour lequel ils se battent, qu’ils protègent et duquel ils attendent l’allégeance. Les Israélites n’avaient pas de roi au début ; c’est Dieu qui devait régner sur eux. Or, en réclamant leur propre monarque, ils ont rejeté Dieu comme roi (1 S 8.6 ; 10.19). Ils ont obtenu leur roi. En effet, ils ont eu de nombreux rois. Chacun d’entre eux a été évalué selon ses actions devant Dieu. Toutefois, ils ont tous échoué, même le meilleur d’entre eux. Aucun n’a été apte à régner sur la terre et à l’assujettir. Cependant, un nouveau roi allait venir. De la lignée imparfaite et divisée qui descendait de David, un trône éternel serait suscité (Ps 89). Ce règne devait s’accomplir en Christ, le roi parfait. Là où il est présent, son royaume existe dans l’attente de celui qui est à venir dans toute sa perfection (Mt 6).
L’Ancien Testament a donc anticipé le roi parfait qui était à venir. Le Psaume 110.1, par exemple, le verset de l’Ancien Testament le plus cité dans le Nouveau Testament, parle de Dieu qui vainc les ennemis de Christ : « Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis ton marchepied. » Le puritain Edward Reynolds (1599-1676) a écrit un traité entièrement dédié à ce psaume. Selon lui, voici ce que Dieu devait accomplir pour Jésus dans son « royaume médiateur » : d’abord, lui préparer un corps auquel le Fils puisse être uni hypostatiquement (Hé 10.5) ; deuxièmement, l’oindre du Saint-Esprit sans mesure (Jn 3.34), afin qu’il soit un roi pieux (És 11.2,3) ; troisièmement, le déclarer roi publiquement (Mt 3.17 ; 17.5) ; quatrièmement, lui donner un sceptre de justice, une épée dans la bouche et la capacité comme prophète-roi de révéler la volonté de Dieu à l’humanité ; cinquièmement, l’honorer en lui donnant des ambassadeurs et des serviteurs (Ép 4.11,12 ; 2 Co 5.20) ; sixièmement, donner à Christ des âmes, non seulement chez les Juifs, mais aussi chez les païens (Ps 2.8 ; Jn 17.6) ; septièmement, lui donner la puissance nécessaire pour gouverner l’Église selon la loi divine (Mt 5 ; Col 2.14) ; huitièmement, lui donner la puissance pour juger et condamner ses ennemis (Jn 5.27) ; et neuvièmement, lui donner l’autorité de pardonner les péchés (Mt 9.6) (2). Par conséquent, Christ s’est acquitté en tous points de son rôle royal.
Le royaume de Christ a été inauguré au cours de son ministère terrestre : « le royaume de Dieu est proche » (Mc 1.15). Ce royaume n’avait rien d’impressionnant pendant que Jésus était dans son état d’humiliation (voir la parabole du grain de sénevé, Mt 13.31,32). Pourtant, il grandirait et l’emporterait sur tout un jour, grâce à son roi (Da 2) ; mais ce jour n’était pas encore arrivé. Les Juifs avaient mal compris et ils cherchaient un roi terrestre qui les délivrerait de l’oppression physique. Ils n’ont pas reconnu que la puissance du royaume se tenait devant eux dans la personne et l’oeuvre de Christ : « au milieu de vous » (Lu 17.21). C’est pour cette raison que Christ a déclaré que son royaume n’était pas de ce monde (Jn 18.36). Son royaume est puissant précisément parce qu’il est spirituel, et également parce qu’il se matérialisera, un jour.
La conquête même que ce peuple cherchait ne se trouvait pas dans l’épée du roi, mais dans sa souffrance. Jésus n’a pas seulement « ôté les péchés » (1 Jn 3.5) lors de sa mort, mais il a aussi vaincu les forces du mal et de la mort. La vraie conquête a eu lieu à sa mort. Le roi a été blessé dans la mort, mais il a écrasé la tête de Satan, celui qui l’a blessé (Ge 3.15). Il est le sacrificateur-roi ; son triomphe et son règne royal ne peuvent pas être considérés séparément de son sacerdoce (ou de son rôle de prophète).
L’exaltation de Christ a eu lieu à sa résurrection. En tant que Fils de Dieu – une description royale – ressuscité avec puissance (Ro 1.4), Jésus exerce désormais sa royauté avec une autorité complète (Mt 28.18). Il remettra son royaume médiateur, que les théologiens appellent parfois la « dispensation du royaume », à son Père lors du jugement final (1 Co 15.24-28). Mais, comme le précise le symbole de Nicée, le royaume de Christ n’aura pas de fin. Il sera le roi des nouveaux cieux et de la nouvelle terre, en tant que Dieu-homme (Ap 22). Sa récompense n’est pas temporelle, mais éternelle.
Après sa résurrection, Jésus a instruit ses disciples concernant le royaume de Dieu, puis il est monté au ciel (Ac 1.2-11). Il a mené un cortège en triomphe lors de son ascension (Ps 68.19 ; Ép 4.8). Ce triomphe a prouvé que sa mort sur la croix était une victoire qui conduirait à d’autres victoires (sa résurrection, son ascension). Ceux et celles qui sont désormais avec lui au paradis, comme le brigand sur la croix, font partie de l’Église triomphante, un royaume victorieux. Il n’y a aucun doute que sa position à la droite du Père achève son exaltation qui a commencé lors de la résurrection. La majesté, la puissance et la gloire du Dieu-homme ont été manifestées et réalisées. Il est exalté, à jamais exalté, et nous l’adorerons comme le roi exalté. Dans son état d’humiliation, la gloire divine qui était innée à sa personne était cachée derrière son corps de chair. Or, au paradis, la nature humaine de Christ est véritablement exaltée de telle manière qu’il peut désormais accomplir tous les desseins de Dieu. Sa puissance s’étend aussi loin que les décrets éternels de Dieu.
Les chrétiens de toute époque peuvent dire, au milieu de la souffrance, de la détresse et des angoisses : « Je sais que Jésus est roi du ciel et de la terre ; tout ira bien. » Sibbes nous exhorte, à juste titre, à savourer l’idée de notre roi exalté :
Ô, quelle douce méditation, bien-aimés, de penser que notre chair est désormais au paradis, à la droite de Dieu ; et que cette chair qui est née d’une vierge, qui a dormi dans l’étable, qui a traversé le pays en faisant du bien aux autres, qui est devenue malédiction pour nous et qui a été humiliée jusqu’à la mort, qui est restée trois jours au tombeau ; que cette chair est maintenant glorieuse au ciel ; que cette personne est Seigneur sur les vivants et les morts. C’est une étude excellente, bien-aimés. Étudiez le Christ dans son état d’humiliation et dans son état d’exaltation (13).
On ne peut pas avoir le Christ exalté sans le Christ humilié, et vice versa. La souffrance et la gloire sont deux côtés d’une même pièce (voir la transfiguration).
Christ a triomphé sur ses ennemis à son intronisation et il détient désormais la puissance royale pour bénir l’Église en lui donnant le Saint-Esprit promis. Il a reçu l’Esprit dans la mesure la plus complète possible à la nature humaine, lors de son intronisation. Et quand il a reçu l’Esprit pour lui-même, il va sans dire qu’il l’a aussi reçu pour son peuple, car il est la tête du corps. Ainsi, l’Esprit a coulé de son front (Ps 45 ; 133.2) jusque sur l’Église, ce qui explique le grand nombre de conversions à la Pentecôte. Le royaume continue à grandir et à remplir la terre, par l’Esprit, qui oeuvre de pair avec Christ.
Notes :
(1). Petit catéchisme de Westminster, Q & R 26, op. cit.
(2). Edward Reynolds, Explication of the Hundred and Tenth Psalm: Wherein the Several Heads of Christian Religion Therein Contained, Touching the Exaltation of Christ, the Sceptre of His Kingdom, the Character of His Subjects; His Priesthood, Victories, Sufferings, and Resurrection, Are Explained and Applied, Religious Tract Society, 1837, p. 6-7.
(3). Sibbes, op. cit., vol. 5, p. 346 (traduction libre).
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