Ce mouvement, créé en 1998, rassemblait des jeunes nés après la loi Veil, qui n’avaient logiquement pas pu s’exprimer au moment du vote de la loi dépénalisant l’avortement. » Survivants « , car nous estimons que nous avions 1 chance sur 5 de ne pas voir le jour : chaque année en France, 200 000 avortements sont pratiqués pour 800 000 naissances.
Aujourd’hui, nous sommes 200 jeunes, animés par le désir de dénoncer les dégâts causés par la loi de 1975. Par des actions radicales, surprenantes et inattendues, nous voulons faire prendre conscience à la société de ce que représente réellement un avortement, et que des alternatives à l’IVG doivent être développées.
Qu’entendez-vous précisément par » actions radicales » ?
Nous pouvons nous définir comme un mouvement d' » agit-prop » mettant en œuvre des actions à fort potentiel médiatique. Nous développons trois types d’action, à commencer par les opérations de type événementiel. Nous sommes là sur le même registre que les Femen ou bien Act Up. Nous nous en différencions par deux principes : la non-violence et la joie de vivre.
Nous ne cherchons évidemment pas à choquer les personnes, tout en sachant bien que, de nos jours, être opposé à l’avortement suscite déjà le scandale.
Ensuite, nous mettons en œuvre ce qu’on peut appeler une » guérilla marketing « , en travaillant sur des actions de détournement, soit de publicité, soit de mobilier urbain.
Enfin, nous mettons l’accent sur le digital et la créativité graphique et visuelle. Nous voulons créer des codes visuels qui soient beaux graphiquement afin que notre message soit pris au sérieux. Et il l’est déjà : des blogs qui ont pignon sur rue dans le milieu de la publicité reconnaissent – sans forcément nous approuver – le fait que nous avons renouvelé les codes graphiques des » pro-life « .
Des actions du même type que les Femen n’engendrent-elles pas des crispations, et, au final, ne risquent-elles pas de devenir contre-productives ?
Nous sommes dans le combat d’opinion et nous voulons le gagner. Cela explique notre radicalité. Pour l’instant, vu l’omerta ambiante de la classe médiatique et politique, l’argent qu’on investit contre nous, nous ne pouvons pas nous contenter de messages passant par des canaux habituels. Il nous faut aller plus loin.
Des personnes ont-elles été touchées par votre message ?
Notre vocation est avant tout de relancer le débat sur l’IVG et de rappeler que la question de l’avortement ne concerne pas que la femme, mais toute la société. Quelques personnes qui ont pratiqué un avortement et qui ont vécu une expérience de guérison viennent nous faire partager leur histoire, sans pour autant devenir militantes.
Vous dites que la question de l’avortement ne concerne pas que la femme. Pourquoi ?
La baisse du nombre d’avortements est un défi collectif. Nous dénonçons en premier lieu le fait que notre société empêche les femmes qui ont pratiqué un avortement d’exprimer leur culpabilité. Elles en sont rendues à se sentir coupables de ressentir une culpabilité, à cause du discours ambiant expliquant que l’avortement est un droit fondamental.
Mais les souffrances existent. Elles restent cachées, car les laisser s’exprimer risquerait de remettre en cause ce » droit « . Elles sont la preuve que l’avortement fait resurgir un manque dont la source provient de la forme d’existence – l’embryon – que l’on a supprimée. Reconnaître ces souffrances serait reconnaître ce qui se cache derrière l’acte d’avorter.
Comment votre mouvement compte-t-il se déployer ?
Nous voulons accueillir tous les jeunes, croyants ou non, politisés ou non, qui souhaitent mettre à disposition leurs compétences pour atteindre notre objectif. Nous organisons un week-end d’intégration et de formation les 2, 3 et 4 septembre prochains. Nous y serons formés aux méthodes d’action médiatique, en travaillant notre discours et nos arguments. Des équipes seront également constituées, en fonction des talents de chacun.
Hugues Lefèvre et Pierre Erceau
Bonjour,
Je trouve que la fondation de ce mouvement est une bonne idée. Ce n’est pas la première fois que j’entends ou je lis que les femmes qui ont avorté en subissent des séquelles psychologiques.
Pour ma part, je suis né avant la promulgation de cette loi, soit dans les années soixante. Je sais que ma mère qui a des problèmes psychologiques voulait me faire avorter ainsi que mes frères et soeurs. Mais comme à l’époque, c’était encore interdit, il y avait quand-même des gens qui le pratiquaient dans la clandestinité et c’était une opération risquée. C’était mon père s’était fortement opposé à cette idée et c’est la raison pour laquelle nous sommes actuellement en vie. C’est aussi pourquoi je désire encourager ces gens qui mettent en place ce mouvement.