Puisque l’équivoque de l’antisémitisme et du nazisme revient comme un élément majeur dans la campagne des votations législatives actuelles en France, il importe d’en démêler quelque peu l’écheveau.
L’antisémitisme nazi ne fut pas exclusivement européen. Il se renforça en s’alliant de façon intrinsèque et quasi fusionnelle avec la haine anti-juive génocidaire du jihadisme, et au contexte historique de la dhimmitude qui condamne à l’extermination tout peuple qui se rebellerait contre la domination islamique. Les révoltes nationalistes des chrétiens des provinces ottomanes d’Europe au XIXe siècle et le génocide arménien en fournissent d’abondantes preuves.
Élaboré par les Pères de l’Eglise dès les Ve et VIe siècles, l’antisémitisme chrétien était fondamentalement antisioniste. Les Juifs devaient expier la Crucifixion par les maux sans cesse renouvelés d’un exil permanent. Les chrétiens de l’Orient islamisé, et notamment ceux de Palestine, s’érigèrent en gardiens féroces de ces croyances. Le combat contre le sionisme qui libérait le peuple juif de l’antisémitisme chrétien et de la déshumanisation dhimmie, procura un terrain de collaboration commune aux antisémites et aux jihadistes contre le peuple juif. Cette alliance se manifesta dès les décennies 1920-30 avec l’émergence dans les pays arabes de formations de jeunesse fascistes et nazies, réunissant chrétiens et musulmans dans le Nationalisme arabe. Ces mouvements s’amplifièrent pendant la Deuxième Guerre mondiale, avec l’embrigadement dans la Wehrmacht et les SS de contingents musulmans d’origine arabe, européenne ou d’Asie, distribués dans les pays occupés par le III Reich.
L’âme de la collaboration nazie euro-arabe et islamo-chrétienne sur les terrains militaires ou dans la machinerie d’extermination des Juifs et de la propagande, fut Amin al-Husseini, l’ex-mufti de Jérusalem grand admirateur de Hitler, réfugié à Berlin et héros du jihad contre le peuple juif. Des études approfondies sur ce sujet, notamment dernièrement celle de Mattias Künzel, devraient être connues du grand public et sortir des discussions feutrées de boudoir.
La paix en 1945 mit fin à l’extermination des Juifs en Europe. Cette mission désormais incomba aux Arabes alliés et collaborateurs des nazis européens. Ils s’en chargèrent par la persécution renforcée des Juifs des pays arabes, la glorification du régime hitlérien auquel plusieurs officiers militaires arabes s’étaient clandestinement ralliés, et par le jihad contre les Juifs palestiniens. Au cours des années suivantes, le rapprochement du nazi-islamisme avec sa matrice européenne de fonctionnaires collaborationnistes influents ne cessa jamais. Des criminels de haut niveau émigrèrent en Egypte, Syrie et Irak où, convertis à l’islam, ils occupèrent des postes administratifs et politiques importants, notamment dans le jihad anti-israélien et la formation militaire des hommes d’Arafat au terrorisme et à la propagande. De ce terreau monta l’astre ardent de la Palestine, porté par la collusion des deux haines antisionistes, chrétienne et musulmane. Elles inversèrent les rôles et attribuèrent aux persécuteurs les caractères de leurs victimes juives qu’elles assimilèrent aux nazis. Ce miroir inversé de l’histoire juive qui exonérait les criminels fut diffusé dans les médias, les églises, les camps de vacances d’Europe et des chrétiens arabes d’Israël et jusque dans les instances internationales. La subversion de l’histoire par la propagande permit d’incriminer l’Etat d’Israël parce qu’il avait ôté à ses oppresseurs, au bout de 13 siècles, les justifications et les moyens de dépouiller et d’exterminer les Juifs.
Entretemps, les défis principaux de l’Europe décimée de l’après-guerre s’exprimaient dans l’urgence de sa reconstruction et de son unification. La décolonisation, notamment des pays arabes, et le danger communiste, influaient les politiques internationales. Dans un contexte de non-épuration, les administrations de la collaboration restèrent en place et élurent comme premier Président de la Commission européenne Walter Hallstein, nazi convaincu de la première heure, officier militaire allemand et juriste éminent, concepteur en 1938 d’une nouvelle Europe unifiée et sans frontières, judenrein, et soumise au gouvernement du IIIe Reich. Je renvoie ici aux publications de François Asselineau, Annie Lacroix-Riz et Philippe de Villiers entre autres.
Sous une telle autorité à la tête de la Commission européenne, la reprise de relations privilégiées avec les pays arabes décolonisés redevint une priorité.
Dès les décennies 1960-70, la pression du terrorisme palestinien, aggravée par la piraterie aérienne et le boycott du pétrole par la Ligue arabe, conduisirent à une reddition de la Communauté européenne aux exigences de l’OLP et de la Ligue arabe, souhaitée notamment par la France et la Grande-Bretagne. En 1980, après l’accession au pouvoir de Khomeiny, et craignant une pénurie de pétrole, la CE émit une déclaration (Déclaration de Venise) où elle préconisait la création d’un Etat palestinien à l’intérieur de l’Etat d’Israël avec Jérusalem comme capitale. C’est la seule fois peut-être dans l’histoire que des Etats s’autorisent de leur propre chef à imposer à un pays reconnu internationalement, Israël, l’implantation d’un autre Etat, ennemi de surcroît et qui affiche publiquement sa mission de le détruire. Ce texte, qui n’était qu’une humble offrande à l’OLP pour obtenir des contrats commerciaux après le refroidissement des relations euro-arabes suite à la paix séparée égypto-israélienne (1979), est considéré encore aujourd’hui comme un monument intangible.
Dans les décennies suivantes, la guerre euro-arabe du palestinisme contre Israël prenait naturellement le relai des combats communs de l’euro-nazisme et du nazi-islamisme des années 1940. Elle s’accompagna d’une politique fusionnelle de l’UE avec le monde arabe et musulman riverain de la Méditerranée. Les enjeux de cette collaboration n’étaient pas identiques de part et d’autre de la mer. La Communauté européenne ambitionnait un développement économique et industriel. Mais les pays de la Ligue arabe et de l’Organisation de la Coopération Islamique (rassemblant 56 pays musulmans) exigeaient de l’Europe une glorification de la civilisation islamique, le remplacement d’Israël par la Palestine, une immigration portes-ouvertes, le respect des mœurs et des lois des immigrés, et la promotion de la diversité dans tous les secteurs.
D’importants instruments implantèrent cette politique, comme Le Dialogue euro-arabe (1974) patronné par le président de la Commission européenne et le Secrétaire-général de la Ligue arabe, la Déclaration de Barcelone (1995), la Fondation Anna Lindh (2002), l’Alliance des Civilisations (2004), le Pacte des Migrations, et bien d’autres organes de politique internationale et internes à l’UE propres à la mondialisation et au développement d’une dynamique d’assimilation euro-arabe et islamo-chrétienne à tous les niveaux. L’embrigadement de l’UE dans le jihad palestinien la conduisit à justifier et intégrer l’idéologie jihadiste bien qu’elle en soit, tout comme Israël, une cible.
Bref, l’aboutissement de ces politiques accoucha de l’Europe que nous avons aujourd’hui sous les yeux.
Car c’est finalement cela, l’enjeu existentiel qu’affronte l’Europe aujourd’hui, après avoir renié son origine spirituelle par sa condamnation irrémédiable d’Israël, et son allégeance dès 1973 au nazi-djihadisme. La keffieh bédouine remise à l’honneur par Yasser Arafat commémore la conquête par les Bédouins des pays chrétiens. Elle en est le drapeau et le ralliement.
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