Chercheur épidémiologiste à l’Inserm et directeur de l’Institut de recherche pour la valorisation des données de santé (IRSAN), Laurent Toubiana étudie l’évolution de la Covid-19 en France depuis début mars. Son analyse est sans appel : l’épidémie est terminée !
Retour sur des mesures sanitaires vraisemblablement disproportionnées.
Depuis le début de la pandémie, combien de morts la Covid-19 comptabilise-t-elle officiellement ?
Selon les statistiques de Santé Publique France, la Covid a causé un peu plus de 30 000 décès en France. Pour schématiser, 20 000 personnes seraient mortes à l’hôpital et 10 000 en Ehpad.
Validez-vous ces chiffres ?
Les méthodes de comptage utilisées en France ont probablement biaisé les résultats à la hausse. Lorsque nous étions en phase épidémique, il était certainement plus simple de noter sur le certificat de décès « Covid » comme cause principale. Il eut pourtant été plus judicieux de faire la différence entre ceux dont la cause principale était effectivement la Covid et ceux qui sont décédés « avec » la Covid, sans que ce ne soit la première cause. Cette distinction a son importance car les Ehpad sont remplis de personnes porteuses de polypathologies. Et les personnes hospitalisées durant le pic épidémique présentaient très souvent des comorbidités importantes. Dans bien des cas, ces dernières ont certainement été les causes principales du décès. L’Allemagne a utilisé un autre système qui explique les différences de chiffres. Le Royaume-Uni vient quant à lui de changer son système de comptage afin de ne plus inclure de décès non liés directement au virus.
30 000 décès depuis le mois de mars, c’est 30 000 décès de trop mais on est loin des pronostics avancés…
Précisons qu’il s’agit de 30 000 décès sur 6 mois (mars-septembre). En comparaison, la grippe 2018-19 a tué 13 100 personnes en 2 mois seulement[1] et la canicule de 2003 a causé près de 20 000 victimes. Quant au tabac, il décime en moyenne 73 000 individus chaque année, soit plus de deux fois plus que la Covid. Pourtant, on n’arrête pas un pays parce que les gens fument !
Quelle est la situation épidémiologique aujourd’hui ?
Avant de vous répondre, procédons à un peu de pédagogie ! On entend actuellement beaucoup le mot « incidence ». C’est une bonne chose car au moment de l’apparition de la Covid-19, on se contentait d’ajouter les nouveaux cas aux cas précédents. Psychologiquement, c’est terrible car cela donnait l’impression que l’épidémie augmentait constamment ! Aujourd’hui les journalistes utilisent ce mot, mais ils l’emploient n’importe comment.
L’incidence est le nombre de nouveaux cas par unité d’espace (une ville, un département, un pays…) et de temps (un jour, une semaine, un mois…). Pour que les chiffres soient parlants, les épidémiologistes calculent des taux d’incidence : ils rapportent le nombre de nouveaux cas d’un espace donné à la population de cet espace. Cela permet de comparer Paris versus La Rochelle par exemple, et ainsi d’identifier les lieux où il y a le plus de foyers épidémiques.
Je vais maintenant illustrer précisément votre réponse. Le 28 août 2020, le chiffre de 7489 nouvelles contaminations par jour a été officiellement diffusé sur le site de Santé publique France. Cette information a été diffusée après une sorte de campagne médiatique au slogan ravageur : « le nombre de cas augmente exponentiellement ». Mais extraire un chiffre brut ne présente aucun intérêt… en dehors d’affoler les citoyens !
C’est-à-dire ?
Il ne s’agit pas de 7489 nouvelles contaminations mais de tests PCR (virologiques) positifs. Le même jour, 174 556 tests PCR étaient négatifs mais cette information n’a pas été relayée ! Le lendemain (29 août), il n’y avait plus que 2 929 « cas », et le surlendemain seulement 1 291 ! Il est cependant plus vendeur pour un média d’afficher un chiffre proche de 7000 que 1200.
A entendre les médias, le nombre d’hospitalisations continue d’augmenter et le virus tue toujours. Quelle est votre interprétation ?
Oui, les hospitalisations augmentent. Oui, la Covid fait encore des victimes. Mais là encore, ce sont des données brutes qui attisent la panique ! Il est indispensable d’analyser ces chiffres. Dans la grande majorité des départements, il n’y a plus d’hospitalisations. Il n’y a guère que dans les grandes villes (Paris, Lyon, Marseille, et leurs banlieues) à forte concentration d’individus que le nombre augmente légèrement.
En outre, les médias oublient de rappeler que la plupart des vols internationaux ont repris. L’épidémie est arrivée de l’étranger. Certaines personnes qui atterrissent en France sont malades et désormais hospitalisées sur notre territoire, ce qui n’était pas le cas jusqu’alors. On ne comptabilise donc plus la même chose.
Concernant les décès, on est sur une moyenne de 15 par jour. Bien sûr, c’est encore trop mais lors du pic épidémique, on recensait 700 morts quotidiens ! Il faut toujours rapporter un chiffre à une donnée connue. Contrairement aux messages véhiculés par les médias, j’affirme que l’épidémie est terminée !
Si l’épidémie est terminée, il n’y aura donc pas de seconde vague ni de reconfinement ?
Bien sûr que non, c’est de la pure fantasmagorie ! Prenez les dernières épidémies : H1N1, SRAS, MERS, chikungunya…. Il n’y a jamais eu de seconde vague. S’il devait y en avoir une, elle aurait eu lieu dès le déconfinement, au moment où tout le monde s’est retrouvé dans la rue, les commerces, en vacances…
Ce n’est pas ce qui se lit dans la presse…
Je ne crois pas au complot. En revanche, je crois à la bêtise humaine ! En période d’incertitude, l’information négative est toujours celle à laquelle les gens ont besoin de s’accrocher. Refuser de prendre en considération une information négative est en outre beaucoup plus risqué que de donner un quelconque crédit à une information positive. Ceux qui prédisent des catastrophes gagnent toujours et ils le savent. La preuve : les experts qui avaient annoncé 500 000 décès « Covid » en France sont toujours là et continuent de surfer sur la vague alarmiste. Nos décideurs ont par ailleurs besoin de s’appuyer sur des chiffres qui font croire à la poursuite de l’épidémie. Le gouvernement français a tout de même arrêté l’économie du pays pendant deux mois ! Le prix de cette décision est exorbitant. Aujourd’hui, il a besoin de justifier cette mesure. Il lui est impossible de rétropédaler en disant : “Désolé, on s’est trompé, finalement ce n’était pas si grave que ça !” Les informations véhiculées par les médias lui permettent de valider leur système : “Vous avez vu, c’est très grave il faut continuer de porter le masque pour éviter une seconde vague et un reconfinement.” Tout cela est complètement irrationnel et pourtant…
Que pensez-vous de la gestion de la crise sanitaire par le gouvernement ?
J’espère que nous avons affaire à des hommes de bonne volonté qui ont eu très peur et qui, pour cette raison, ont pris des mesures radicales censées éviter une catastrophe sanitaire. Malheureusement, ils en ont provoqué une autre d’ordre économique. Le propre des gouvernements est de surmonter les incertitudes. Force est de constater que le nôtre a failli. Bien sûr, il est difficile de lui jeter la pierre. Néanmoins, la France compte plus de 3000 centres hospitaliers. Comment expliquer que l’on ait convoyé des trains de malades pour désengorger certains centres hospitaliers alors que beaucoup d’hôpitaux privés étaient vides ? L’Etat aurait dû mobiliser l’ensemble des ressources. En 1940, la France pensait avoir la meilleure armée du monde. On connaît la suite de l’histoire. Là, nous sommes un peu dans la même situation : la gestion de la crise nous a montré qu’il y avait d’énormes failles. C’est d’autant plus scandaleux que notre pays met beaucoup d’argent dans son système de soins.
Sur la base de quelle preuves scientifiques le gouvernement s’est-il appuyé pour édicter ses mesures ?
Le confinement généralisé est une grande première de l’humanité. C’est la panique qui a dicté à beaucoup de gouvernements cette mesure, mais il n’existe aucune preuve scientifique permettant d’affirmer que ce serait efficace. Lorsqu’on applique une thérapeutique, on regarde toujours le rapport bénéfice/risque. Le gouvernement a reproché au Pr Raoult d’appliquer une méthode non démontrée scientifiquement (alors que le risque d’utiliser la chloroquine était minime), pourtant il a fait, et continue de faire, exactement la même chose ! Confiner un pays puis obliger sa population à se masquer sont des mesures radicales qui n’ont jamais été testées. La Suède est le seul pays à avoir procédé autrement. Son économie n’a pas été arrêtée et proportionnellement elle compte un nombre de décès équivalent.
Dans la mesure où l’un des modes de propagation de la Covid pourrait être la projection d’aérosols, l’obligation du port du masque à l’extérieur est-elle pertinente ?
Absolument pas ! Il n’y a plus de malades en dehors des murs des hôpitaux. La probabilité qu’un patient asymptomatique – autrement dit qui ne tousse et n’éternue pas – contamine une personne dans la rue est infinitésimale. Cette mesure est totalement disproportionnée.
Le masque fait-il courir un risque sanitaire ?
Je vais vous répondre en procédant par hypothèse car il n’y a pas d’antécédent. Soyons réalistes : peu d’individus changent leur masque régulièrement. Le fait de respirer longtemps dans un masque va en humidifier les fibres. Or l’humidification est propice à la propagation de bactéries. Il est possible que le port du masque entraîne en outre des allergies et des migraines car on respire moins bien avec un tissu sur le nez.
Quel regard portez-vous sur l’engouement des gens pour le test de dépistage sanguin ?
Cela n’a plus aucun intérêt maintenant que l’épidémie est terminée ! Tout comme les masques, c’est lors du démarrage et de la phase d’expansion forte de l’épidémie qu’il aurait fallu utiliser ces outils. Maintenant c’est trop tard. Et regardez l’utilisation qui est faite des résultats ! Les médias comptabilisent les tests positifs. Cela génère inévitablement de l’anxiété. S’ils procédaient inversement, nous pourrions constater que plus de 97% des tests sont négatifs. C’est tout de suite beaucoup plus rassurant ! En outre, il existe un énorme amalgame entre “résultat positif” et “maladie”. Les 2,7% de gens qui sont positifs ne sont pas malades ! Ce sont juste des individus chez qui on a trouvé des acides nucléiques du virus. En clair, des gens qui ont été en contact un moment donné avec la Covid-19, mais rien n’indique qu’ils en soient encore porteurs.
Enfin, comme pour tout test, il y a une marge d’erreur : les fameux “faux positifs”. Les chiffres issus des tests de dépistage devraient être assortis d’un intervalle de confiance pour prendre en compte ces erreurs, voire de la charge virale effective (quantification du nombre de virus portés). Bien sûr, ce n’est pas fait. Au risque de me répéter, on est face à une épidémie sans malades ! Ces tests sont donc… bidons !
Avec les Pr Raoult, Perronne et Toussaint, vous êtes l’un des rares experts à porter un discours dissonant dans les médias. Peut-on parler de censure ?
Les médias préfèrent toujours vendre du sensationnel et de la peur plutôt que des bonnes nouvelles. Le traitement de l’épidémie par Le Monde le prouve tous les jours. Je ne suis pas censuré puisque je peux m’exprimer. En revanche, je fais l’objet d’une culpabilisation insupportable, notamment de la part de certains élus de la majorité. Selon eux, je suis un expert “irresponsable” sous prétexte que je refuse de faire le jeu de la psychose.
France Soir a publié les revenus astronomiques versés par Big Pharma à certains grands professeurs de médecine[2]. Une pétition circule pour demander leur démission des conseils scientifiques. Saluez-vous cette initiative ?
Je ne souhaite pas rentrer dans ce débat car ce n’est pas mon combat. Mon rôle consiste à diffuser l’information la plus neutre et objective possible. Je connais très bien les méthodes employées par Big Pharma. S’il y a danger, il vient probablement des experts qui poussent au vaccin, mais il ne faut pas diaboliser tout et n’importe quoi ! Pour faire fonctionner certains projets, les experts sont souvent contraints d’aller chercher des financements là où ils existent. Ce n’est pas parce que l’on est financé par un laboratoire pharmaceutique que les résultats des études sont biaisés.
Le vaccin contre la Covid-19 suscite déjà beaucoup de passions ! Quel regard portez-vous sur cette solution ?
Si nous étions face à une maladie catastrophique, il faudrait se pencher très sérieusement sur les moyens de lutter et le vaccin en ferait partie. Néanmoins, ce n’est absolument pas le cas. Fabriquer un vaccin à la hâte pour une épidémie terminée et finalement bénigne, quel intérêt ? Le risque pourrait être bien supérieur au bénéfice. Par ailleurs, il commence à apparaître une nouvelle peur : que l’immunité ne soit pas définitivement acquise. En clair, une personne contaminée par le Covid-19 ne serait pas à l’abri de se faire re-contaminer. Cela signifie-t-il qu’il faudra se faire vacciner plusieurs fois ?
Cette épidémie continue de générer beaucoup d’angoisse, y compris chez les enfants. Le Pr Raoult a même affirmé que “le pessimisme tue les patients”. En tant qu’épidémiologiste, pouvez-vous mesurer les dommages collatéraux de ce virus ?
Ce n’est pas ma spécialité mais j’espère que mes collègues vont s’y atteler. Si je m’appuie sur ma petite expérience, autour de moi personne n’a été touché par la Covid. En revanche, j’ai assisté à un nombre incalculable d’individus qui ont sombré dans une sorte de folie sanitaire ! Parmi eux, des malades qui ont préféré rester chez eux plutôt que d’aller se faire soigner par peur de la contamination. Je pense que les conséquences pyscho-sociales sont énormes et qu’un certain nombre de patients sont morts pour avoir différé leur traitement.
Quel message voulez-vous faire passer aux personnes angoissées par le contexte sanitaire ?
N’ayez pas peur, elle est très mauvaise conseillère ! Ecoutez d’autres discours et essayez d’objectiver les informations sans croire que c’est forcément du complotisme…
Comment la situation va-t-elle évoluer d’après vous ?
La nature est pleine de ressource et de surprises. Cette épidémie nous prouve que le monde dans lequel nous vivons peut être désorganisé. Néanmoins, j’ai confiance en l’Homme, en sa capacité de rebondir et de s’adapter.
Recueilli par Sandra Franrenet
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