Suite.

C’est ici le lieu de répondre à une question qu’on fait souvent.  » Si ces deux classes de personnes se ressemblent en tant de points, comment pouvons-nous savoir à coup sûr à laquelle des deux nous appartenons ? Le cœur est rusé et désespérément malin par-dessus toutes choses ; comment pourrons-nous discerner si nous aimons Dieu pour lui-même et la sainteté pour elle-même, ou si le désir de nous concilier la faveur de Dieu, l’espoir d’aller au ciel, l’intérêt personnel enfin, sont nos véritables motifs ? « 

Je réponds :

 

1 ° La disposition de notre cœur se manifestera dans notre conduite de chaque jour, notamment dans la façon dont nous traitons les affaires commerciales ou autres. Si, dans ce domaine, c’est l’égoïsme qui nous conduit, aussi vrai que l’Eternel règne, nous ne sommes que des égoïstes. Si nous sommes égoïstes dans nos relations avec les hommes, nous le sommes aussi dans nos relations avec Dieu.  » Car celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit, point?  » La religion n’est pas seulement amour pour Dieu, elle est aussi amour pour l’homme. Si vos transactions de chaque jour montrent, que vous êtes égoïstes, vous êtes inconvertis ; autrement la bienveillance ne serait pas essentielle à la religion et l’on pourrait être chrétien sans aimer son prochain comme soi-même.

2 ° Si vous êtes désintéressé (1) dans votre religion, l’accomplissement de vos devoirs religieux ne sera pas pour vous une tâche pénible. Vous n’irez pas à vos devoirs religieux comme le laboureur (2) à son labourage, uniquement afin d’avoir de quoi vivre. Le laboureur prend plaisir à son travail, mais ce n’est pas pour l’amour de son travail lui-même ; s’il pouvait, il ne labourerait pas ; considéré en lui-même, son labourage n’est pour lui qu’une fatigue, et s’il prend plaisir, ce n’est qu’en vue des résultats, de l’entretien de sa famille, de son bien-être ou de l’accroissement de ses richesses.

Il en est exactement de même pour beaucoup de gens à l’égard de la religion. Ils recourent à elle comme le malade à sa médecine, parce qu’ils en désirent les effets, et parce qu’ils savent qu’ils doivent la prendre ou périr. Elle est pour eux une tâche qu’ils n’accompliraient jamais pour elle-même. Supposez que l’homme aime à travailler comme l’enfant à jouer. Il travaillera toujours et n’en sera jamais dégoûté ; il le fera sans autre motif que le plaisir qu’il prouvera à travailler. Il en est ainsi de la religion quand elle est aimée pour elle-même ; on ne trouve aucune fatigue la pratiquer.

(1) Il ne faut pas prendre cette expression au sens absolu ; elle désigne ici le caractère de l’homme qui met la gloire de Dieu et le bien de ses semblables au-dessus de son intérêt propre. Ni la repentance, ni l’amour du chrétien ne sont absolument désintéressés. Finney le reconnaît pleinement quand il dit plus loin que  » c’est un devoir pour l’homme de rechercher son propre bonheur  » et que celui qui ne le fait pas pèche.  » Mais il ne veut pas que cette recherche ait la prédominance dans notre vie. (Trad.).

(2) Anglais : travailleur. (Trad.)

 

3 ° Si l’égoïsme est le trait dominant de votre religion, celle-ci prendra tantôt une forme, tantôt une autre.

Supposons, par exemple, un temps de froideur générale dans l’église. Les vrais chrétiens n’en goûteront pas moins les joies secrètes de la communion avec Dieu, quoique pour le moment leur piété ne se manifeste pas beaucoup au dehors. En un tel temps, le faux converti, au contraire, ne pensera guère qu’au monde et à ses biens. Mais que tout à coup les chrétiens se lèvent pleins de résolution, qu’ils se mettent à l’œuvre, qu’ils fassent éclater leur joie, en sorte qu’on recommence à parler de la religion ; et vous verrez peut-être les faux chrétiens recommencer à se donner du mouvement jusqu’à paraître plus zélés que les vrais chrétiens. Ils y sont poussés par leurs convictions, non par leurs affections.

Quand la religion n’éveille pas l’intérêt du public, le chrétien de nom reste dans l’indifférence ; mais que l’église réveille, et le voilà convaincu de péché et forcé de se mettre en branle pour conserver la paix de sa conscience.
Au fond, ce n’est qu’une forme d’égoïsme succédant à une autre.

 

4 ° Si vous êtes égoïste, la jouissance que vous trouverez dans votre religion dépendra surtout de la vivacité de votre espérance d’aller au ciel, elle ne procèdera pas de l’exercice de vos affections. Votre bonheur ne consistera pas à avoir une religion active, comme c’est le cas chez le vrai saint ; Il consistera dans l’attente des biens du ciel. On entend souvent des chrétiens dire que leur joie disparaît quand ils perdent leurs espérances. La raison en est bien simple. S’ils aimaient la religion pour elle-même, leurs jouissances ne dépendraient pas de leurs espérances. Si vous aimiez la charge que vous avez dans le service de Jésus-Christ, vous seriez heureux même en enfer, pourvu que Dieu vous permît d’y accomplir les devoirs de cette charge ; car, en ce cas, vous feriez ce qui vous plairait le plus.

Si votre joie n’est pas puisée dans le service de Dieu, mai uniquement dans vos espérances personnelles, votre religion n’est pas religion, mais égoïsme.

Je ne dis pas que les vrais chrétiens ne jouissent pas de leur espérance ; je dis que cette espérance n’est pas pour eux l’essentiel. J’ajoute même qu’ils n’y pensent pas beaucoup. Leurs pensées sont occupées ailleurs.

 

5 ° Si vous êtes égoïste dans votre piété, vous jouirez surtout par anticipation. Le vrai saint jouit déjà de la paix de Dieu, le ciel a déjà commencé dans son âme ; il n’en a pas seulement la perspective ; la vie éternelle est actuellement en lui. Il a cette foi qui est  » une substance des choses qu’on espère.  » Ses sentiments sont véritablement ceux du ciel ; sa joie n’est pas portée au même degré que celle des bienheureux, mais elle est de même nature ; et elle est proportionnée à sa sainteté, non à son espérance.

 

6 ° A ceci encore on reconnaîtra si l’on n’a qu’une religion égoïste. Celui dont la conversion est illusoire a seulement l’intention d’obéir à Dieu, tandis que le vrai chrétien PRÉFÈRE l’obéissance à la désobéissance. Cette distinction est importante et je crains qu’il n’y ait que peu de personnes qui la fassent. Ils sont innombrables, en effet, ceux qui ont l’intention d’obéir, sans avoir une préférence véritable pour l’obéissance. Cette préférence est LE choix actuel, elle est l’obéissance du cœur. Vous entendez souvent des gens dire qu’ils ont eu l’intention de faire tel acte d’obéissance ; puisqu’ils ne l’ont pas fait. Et ils vous diront combien il est difficile d’exécuter ses résolutions. Le vrai saint, par contre, préfère réellement l’obéissance et il la choisit dans son cœur, aussi trouve-t-il facile d’obéir. L’un a une intention d’obéir comme celle que Paul avait avant qu’il fût converti, et dont nous parle au chapitre VII de l’épître aux Romains. Il avait une forte intention d’obéir, mais il n’obéissait pas, parce que son cœur n’y était pas. Le vrai converti préfère obéissance pour elle-même, il la choisit et la pratique ; l’autre se la propose parce qu’il sait qu’elle est le seul elle, I in pour parvenir au bonheur.

 

7 ° Le vrai converti et le converti imaginaire diffèrent encore dans leur foi. Le premier a dans le caractère de lieu une confiance qui le conduit à une soumission sans réserve à Dieu. On parle beaucoup des différentes espèces de foi, mais ce qu’on en dit n’a pas toujours beaucoup de sens. La confiance dans les promesses spéciales

Seigneur dépend de la confiance dans le caractère de Dieu. Il n’y a que deux principes d’obéissance à un gouvernement quelconque, humain ou divin, à savoir : la crainte et la confiance. Ou l’obéissance procède de l’espérance de a récompense et de la crainte du châtiment, ou elle procède de Cette confiance qui produit l’amour. Un enfant bien né obéit à ses parents parce qu’il a confiance en eux ; il a, à leur égard, la foi qui agit par l’amour. Celui qui est poussé par l’espérance et la crainte n’a qu’une obéissance extérieure, il n’a pas l’obéissance du cœur, il n’a pas l’amour. Le vrai converti obéit parce qu’il aime Dieu ; il cette confiance qui consiste à se remettre soi-même tout entier entre les mains de Dieu, dans la plus absolue soumission, pour faire tout ce que Dieu voudra.

L’autre n’a qu’une foi partielle et une soumission partielle. Le démon aussi a une foi partielle. Il croit et il tremble. Nous pouvons croire que Jésus-Christ est venu pour sauver les pécheurs, et en conséquence nous soumettre à lui pour être sauvé, sans cependant nous soumettre entièrement à lui pour qu’il nous gouverne et qu’il dispose de nous comme bon lui semblera ; cette soumission n’est que conditionnelle, et la condition, c’est que nous allions au ciel. C’est ici la religion égoïste. La religion du vrai saint est tout autre, c’est celle de l’amour.

 

8 ° Encore une différence. Si votre religion est égoïste, vous vous réjouirez particulièrement de la conversion des pécheurs quand elle aura eu lieu par votre moyen, parce que vous penserez en avoir une grande récompense ; mais cette conversion ne vous donnera qu’une bien mince satisfaction quand elle aura été obtenue par d’autres que vous, vous en serez même envieux.

Le vrai saint se réjouit sincèrement de voir les autres utiles ; il se réjouit quand les pécheurs sont convertis par d’autres, comme s’ils l’étaient par son propre moyen.

Il y a des personnes qui prennent grand intérêt à un réveil tant que ce réveil les touche de près ; mais qui semblent préférer que les pécheurs restent inconvertis, plutôt que de les voir arriver au salut par un évangéliste ou un pasteur d’une église autre que la leur.

Le vrai esprit de l’enfant de Dieu consiste à dire :  » Seigneur, envoie qui tu veux envoyer, que seulement les âmes soient sauvées et ton nom glorifié!  »

 

V.

 

Je vais maintenant répondre à quelques objections.

l ° Objection. « ” Ne dois-je tenir aucun compte de mon propre bonheur?

l ° Réponse. « ” Il est juste que vous teniez compte de votre propre bonheur, en lui attribuant la part d’importance qu’il a réellement. Mettez-le dans un des plateaux de la balance, mettez dans l’autre la gloire de Dieu et le bien de l’univers ; et n’attribuez plus à votre bonheur que la valeur relative qui est la sienne. C’est ce que Dieu fait, et c’est aussi ce qu’il vous demande de faire quand il vous commande d’aimer votre prochain comme vous-même.

2 ° Réponse. « ” En fait, vous travaillerez à votre propre bonheur précisément dans la mesure où vous l’oublierez.
Votre bonheur sera en proportion de votre désintéressement.

Il peut y avoir du plaisir dans la satisfaction des désirs égoïstes mais ce n’est pas un bonheur réel. Le vrai bonheur se trouve surtout dans la satisfaction des désirs vertueux. Or, pour être vertueux le désir doit être désintéressé. J’aperçois un mendiant dans la rue, assis sur le bord du trottoir.

Touché de compassion, j’entre dans la boulangerie voisine et je lui achète un pain. La physionomie du malheureux s’illumine et exprime une profonde gratitude. Ma satisfaction, à moi, sera proportionnée à la pureté de mes motifs. Si j’ai agi par pure bienveillance, le plaisir d’avoir fait du bien me suffira ; si le désir de paraître bon est entré pour quelque chose dans mon action, je ne serai pas tout à fait content à moins qu’elle ne soit connue.

Vous rencontrez un pécheur entièrement corrompu. Votre compassion est excitée ; vous parlez à ce pécheur et vous l’amenez au Sauveur. Si vous avez eu pour motif d’en acquérir de l’honneur auprès des hommes et de vous assurer la faveur de Dieu, vous ne serez pas complètement heureux tant que votre action ne sera pas colportée de bouche en bouche ; peut-être même ne le serez vous pas à moins qu’elle ne soit publiée dans les journaux. Mais si vous n’avez eu d’autre désir que celui de sauver une âme de la mort, dès que Vous verrez ce désir accompli, votre satisfaction sera complète et votre joie sans mélange. De même en est-il pour tous les devoirs religieux : le bonheur est exactement proportionné au désintéressement.

Si vous vous appliquez à faire le bien, en vue du bien lui-même, vous serez heureux en proportion du bien que vous ferez. Mais si vous vous proposez comme but votre propre bonheur et que vous fassiez le bien seulement en vue d’être. heureux, vous manquerez votre but. Vous serez semblable à un enfant qui poursuit sa propre ombre ; il ne peut jamais l’atteindre ; elle reste toujours à la même distance de lui. Supposons que vous soyez dans le cas que j’ai cité plus haut et que vous n’ayez aucun désir de secourir le mendiant, mais que vous ayez en vue d’obtenir l’approbation de telle ou telle personne ; vous n’éprouverez alors aucun plaisir du bien fait au mendiant ; seule l’approbation que vous aurez recherchée pourra vous satisfaire. De même, si travaillant à la conversion des pécheurs, ce n’est pas par amour pour les pécheurs que vous agissez, cette conversion ne peut vous rendre heureux, elle n’a rien qui puisse satisfaire le désir qui vous aura fait agir.

– La vérité est que Dieu a fait le cœur de l’homme tel que pour être heureux, il doit se proposer comme luit le bonheur des autres. Les gens du monde manquent leur but parce qu’au lieu de rechercher le bonheur des autres, ils recherchent leur propre bonheur. C’est la recherche même du bonheur qui rend le bonheur impossible. Si l’homme voulait abandonner cette recherche et se vouer au bien, il serait heureux.

2 ° Objection. Jésus-Christ n’a-t-il pas eu en vue la joie qui lui était proposée? Moïse n’a-t-il pas eu égard à la rémunération? Et n’est-il pas écrit que nous aimons Dieu parce qu’il nous a aimés le premier?

1 ° Réponse. Il est vrai que Jésus-Christ a méprisé l’ignominie et souffert la croix en vue de la joie qui était devant lui. Mais quelle était cette joie? Ce n’était pas son propre salut, ni son propre bonheur, mais le bien immense qu’il voulait faire au monde en le sauvant. Il était parfaitement heureux en lui-même. Le bonheur des autres était son but. C’est ce bonheur qui était la joie mise devant lui, joie qu’il a obtenue.

2 ° Réponse. Quelle était la rémunération que Moïse avait en vue? (Heb 11 :24-26) Etait-ce son propre bonheur? Loin de là ! C’était le salut du peuple d’Israël. Quand Dieu lui proposa de détruire le peuple et de faire de lui une grande nation, s’il avait été égoïste, il aurait répondu:  » C’est bien, Seigneur, qu’il soit fait à ton serviteur selon ce que tu as dit.  » Mais son cœur était tellement au salut de son peuple et à la gloire de Dieu, qu’il ne songea pas un instant à ce qui le concernait et qu’il répondit à Dieu :  » Pardonne leurs péchés! sinon efface-moi de ton livre,  » Plus tard, Dieu lui renouvela son offre.  » Je détruirai le peuple, lui dit-il, mais je ferai de toi une nation plus grande et plus puissante que lui. «  Mais Moïse se montra toujours uniquement préoccupé de la gloire de Dieu.  » Les Egyptiens l’entendront dire, répondit-il, et toutes les nations diront :  » C’est parce que l’Eternel n’avait pas le pouvoir de mener ce peuple dans le pays qu’il avait juré de lui donner. «  Il ne peut supporter la pensée d’être favorisé aux dépens de la gloire de Dieu. Que Dieu soit glorifié et Israël sauvé, c’était en réalité une plus grande récompense pour lui qu’un avantage personnel quelconque.

 

3 ° Réponse. Quand il est dit :  » Nous l’aimons parce qu’il nous aima le premier,  » ce langage ne comporte que deux interprétations ; il signifie ou bien que cet amour de Dieu nous a engagés à retourner à lui et nous a portés à l’aimer, bien que nous aimons Dieu seulement à cause des faveurs qu’il nous accorde. Or, ce second sens est évidemment inadmissible. Jésus-Christ l’a expressément réprouvé dans son sermon sur la montagne :  » Si vous aimez ceux qui vous aiment ; quelle récompense en aurez-vous? Les publicains n’en font-ils pas autant ?  » dit-il. Si nous n’aimons pas Dieu à cause de son caractère souverainement aimable, et que nous ne l’aimions qu’en raison des faveurs qu’il nous accorde, Jésus-Christ l’a déclaré : nous sommes semblables aux païens (1).

(1) Le lecteur comprend que Jésus-Christ ne nous défend pas d’aimer ceux qui nous aiment ; que la reconnaissance est au contraire un devoir ; et l’ingratitude, le comble de l’égoïsme. Il comprend de même que nous devons aimer Dieu aussi à cause des Saveurs qu’il nous accorde. (Trad.)

 

3 ° Objection. « ” La Bible ne présente-t-elle pas le bonheur comme récompense de la vertu?

 

Réponse. « ” La Bible parle du bonheur comme résultat de la vertu, mais elle ne déclare nulle part que la vertu consiste poursuivre le bonheur. Elle est partout opposée à une semblable pensée ; elle fait consister la vertu à faire du bien aux autres. Une saine psychologie montre qu’il doit en être ainsi. Si quelqu’un désire le bien des autres, il sera heureux dans la proportion oit il pourra satisfaire ce désir.

4 ° Objection. « ” Dieu se propose pour but notre bonheur, devons-nous être plus bienveillants que Dieu ? Ne devons-nous pas être semblables à lui? Ne devons-nous pas avoir le même but que lui?

Réponse. « ” Cette objection est spécieuse, mais futile, sans valeur aucune. Dieu est bienveillant pour  » les autres « . Il se propose le bonheur « des autres, » il se propose notre bonheur. Etre semblable à lui, c’est se proposer le bonheur des autres ; c’est faire nos délices tout d’abord du bonheur et de la gloire de Dieu, puis du bonheur et de la gloire de l’univers.

 

5 ° Objection. « ” Pourquoi la Bible fait-elle continuellement appel à nos espérances et à nos craintes, si a considération de notre propre bonheur n’est pas un motif légitime d’action ?

1 ° Réponse. « ” La Bible fait appel aux instincts constitutifs de notre être, mais non pas à notre égoïsme. L’homme craint le malheur et ce n’est pas mal à lui de l’éviter et de rechercher son propre bonheur, pourvu que cette recherche soit subordonnée à la gloire de Dieu.

2 ° Réponse. « ” L’humanité a été tellement abrutie par le péché, qu’à moins de faire appel à ses espérances et à ses craintes, il n’est pas possible d’attirer son attention sur la beauté du caractère de Dieu et sur les raisons qu’elle a de l’aimer. Mais quand l’homme est rendu attentif et que sa conscience est éveillée, Dieu lui présente l’Evangile. Quand un ministre a prêché les terreurs de Dieu, de sorte qu’il a alarmé, réveillé ses auditeurs et conquis leur attention, il ne doit pas continuer à prêcher dans le même sens, mais exposer dès lors à ses auditeurs tout le caractère de Dieu, de manière à ce qu’ils l’aiment à cause de sa propre excellence.

6 ° Objection. « ” Les écrivains inspirés ne disent-ils pas:  » Repentez-vous, croyez à l’Evangile et vous serez sauvés?  »
Réponse. « ” Oui ; mais ils exigent la vraie repentance qui consiste à abandonner le péché parce qu’il est odieux et abominable en lui-même. Ce n’est pas la vraie repentance que d’abandonner le péché à condition que l’on soit pardonné. La Biblerequiert la vraie foi et la vraie soumission ; non pas une foi conditionnelle, non plus qu’une soumission partielle. Et elle y insiste. Elle dit, il est vrai :  » vous serez sauvés,  » mais elle veut pour cela la repentance qui procède de l’amour et la soumission sans réserve ni condition.

7 ° Objection. « ” L’Evangile ne présente-t-il pas le pardon comme un motif de se soumettre à Dieu ?

Réponse. « ” Cela dépend du sens que vous donnez à ce terme de MOTIF. Si vous entendez que Dieu déploie devant les hommes tout son caractère et toute la vérité concernant la bonne nouvelle du salut, comme motifs qui doivent, les porter à l’amour de Dieu et à la repentance, je réponds : Oui, la compassion de Dieu et sa disposition à pardonner sont des raisons pour aimer Dieu, parce que ce sont là des traits de son glorieux caractère qui est infiniment digne de notre amour. Mais si vous entendez par  » motif » une condition, et que vous vouliez dire que le pécheur doit se repentir à condition que le pardon suive, je réponds que nulle part la Biblene présente une semblable idée. Nulle part elle n’autorise le pécheur à dire : Je me repentirai SI tu veux me pardonner.

 

Je termine par deux courtes remarques.

 

  1. Le sujet que nous avons étudié nous montre pourquoi il y a parmi les chrétiens de profession des vues si différentes sur la nature de l’Evangile,

Les uns le regardent comme une concession faite à l’humanité, de sorte que Dieu serait devenu moins strict qu’il ne l’était sous la loi. Aussi pensent-ils qu’il leur est permis de faire une large part à l’amour du monde, et que l’Evangile viendra, combler les lacunes de leur obéissance et les sauver.

Les autres reconnaissent, dans l’Evangile la surabondante bienveillance de Dieu ayant pour premier but de détruire le péché et de produire la sainteté ; de sorte que bien loin de donner aux hommes la facilité d’être moins saints qu’ils devaient l’être sous la loi, toute la valeur de l’Evangile consiste au contraire dans le pouvoir qu’il a de les rendre saints.

 

  1. Nous voyons pourquoi nombre de chrétiens de profession se préoccupent beaucoup plus de la conversion des pécheurs, que de voir l’église sanctifiée et Dieu glorifié par les bonnes œuvres de son peuple.

Beaucoup de chrétiens ressentent une sympathie naturelle pour les pécheurs et désirent les voir sauvés de l’enfer ; cela fait, leur préoccupation ne va pas plus loin. Mais quant aux vrais saints, c’est le péché, en tant que déshonorant Dieu, qui les affecte au plus haut point. Ce qui cause leur plus grande détresse, c’est de voir le péché des chrétiens, parce que c’est celui-là qui plus que tout autre, déshonore Dieu.