J’ai appris un peu plus tôt que la plupart des Français pleuraient la mort de Johnny Hallyday. Quand il est trois heures du matin en France, la soirée commence à  peine à  Las Vegas où je vis.

 

J’ai rencontré Johnny Hallyday il y a un peu plus de quarante ans, à  l’époque où je travaillais dans le théâtre et la chanson. J’en ai gardé le souvenir d’un homme simple et bon, malgré la célébrité qui l’entourait déjà  à  l’époque. Ceux que j’ai rencontrés et qui l’ont côtoyé plus tard en ont gardé le même souvenir que moi.

En apprenant la nouvelle, ma fille de dix-sept ans a pleuré, et cela m’a donné les larmes aux yeux. J’étais plus jeune qu’elle quand j’écoutais déjà  Johnny Hallyday, il a plus d’un demi-siècle. Peu d’artistes ont une carrière qui s’étend sur six décennies.

Au fil du temps, Johnny Hallyday s’était construit ce que je considère comme le plus beau répertoire de la chanson française et avait su remarquablement choisir ses auteurs. Il était à  ses débuts d’un magnétisme rare, et il a gardé ce magnétisme toute sa vie.

Il était devenu le plus grand interprète français vivant, et toute reprise par un autre que lui d’une chanson qu’il s’est appropriée magistralement n’est qu’une pale copie.

C’était un homme parti de rien, autodidacte, qui s’était construit lui-même et qui avait montré que c’était possible, en n’ayant rien au départ, d’aller très haut.

C’était un homme d’une droite discrète, loin des engouements politiquement corrects de la gauche bien pensante.

Il aimait l’Amérique, ce que je comprends puisque j’ai choisi d’y vivre. Il était devenu résident de Los Angeles où il pouvait mener une vie plus simple qu’à  Paris.

C’était un ami d’Israël où il s’est rendu plusieurs fois, n’ayant que faire des menaces, et il avait au moment de la guerre des Six Jours envisagé de partir se battre au côté des Israéliens, pour qu’Israël vive. Il l’avait dit et répété face aux adeptes du palestinisme, ce qui demandait du courage.

Il a accompagné la vie de trois générations de Français. Avec lui, une page immense se tourne, celle d’une France où la vie semblait plus belle et plus simple, plus ouverte à  l’espérance, moins marquée par le ressentiment, pas inquiète d’un déclin possible.

Il n’y aura sans doute plus d’artistes comme lui en France: non pas seulement parce qu’il n’existe chaque siècle en un pays que peu d’artistes de cette stature, mais aussi parce que les temps ont changé, que la France s’est rabougrie, est devenue à  juste titre pessimiste quant à  son futur, s’est faite plus violente, plus islamique, plus soumise à  une pensée unique stérilisante, parce que le marché de la musique a changé et survit par des opérations commerciales éphémères.

Aux Etats-Unis aussi, les plus grands artistes disparaissent et ne sont pour l’heure pas remplacés, la pensée unique monolithique et stérilisante gagne du terrain, le marché de la musique change et survit par des opérations commerciales éphémères.

Une page immense se tourne pour la France. Johnny Hallyday était un grand artiste. C’était un homme bien, et droit. Qu’il repose en paix.

 

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.